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Les constructions palestiniennes de Sainte Hélène

H. Leclercq, ‘Sainte Hélène', in Dictionnaire d'archéologie chrétienne, vol. VII, 2, p. 2131-2135

Une vie de Constantin et de sainte Hélène conservée dans de nombreux manuscrits (1) a été écrite entre le VIIe et le XIe siècle; comme elle se trouve dans les grands m é nologes au 21 mai, il est permis de supposer qu'elle est l'ouvrage du Métaphraste an X e siècle, lequel a pu utiliser une source plus ancienne. Toutefois Nicéphore Calliste et l'auteur de cette vie procédant d'une source commune; celle-ci peut être plus ancienne que le Xe siècle.

Nicéphore énumère avec complaisance les construc­tions palestiniennes de sainte Hélène (2), mais ce fai­sant il ne fait que suivre l'anonyme dont le récit mente d'être conservé (3):

Sainte Hélène fait détruire le temple de Vénus et trouve trois croix avec les clous; une malade est guérie par l'une des croix, la sainte prend donc une part de celle-ci avec les clous pour les porter à son fis Constantin à Byzance, et met le reste dans une chasse d'argent qu'elle donne à Macaire de Jérusalem. L' auteur distingue le saint Sépulcre, le Calvaire — o ὁ τόπος τοῦ κρανίου — et l'endroit situé au levant non loin des deux premiers où l'on trouve les croix. Sainte Helene fit construire l'église de saint Constantin sur l'endroit où elle trouva les croix, l'A νάστασις sur le saint Sépulcre, et «des saints temples » sur le Calvaire (4). Elle fit aussi des degrés de marbre au levant de la sainte cité, descendant vers le lieu - χωρίον - de Gethsémani où est le tombeau de la très sainte mère de Dieu. Après avoir construit en ce lieu un temple splendide au nom de la très pure mère de Dieu, elle enferma son très saint tombeau dans l'autel de l'église (5) ‘Il est dit par beaucoup, comme nous l'avons appris, que le même lieu incliné est appelé Vallée de Pleurs, et Torrent de Cédron, et Vallée de Josaphat ; mais le jardin dans lequel le Christ et notre Dieu fut livré était là, ainsi que le lieu dans lequel le Seigneur pria la nuit où il fut livré» (6).

Sainte Hélène alla à la montagne des Oliviers au levant et y bâtit une église (7) ; elle descendit au tombeau du bienheureux saint Lazare à Béthanie, qui est à deux milles de la sainte cité; elle arrosa des larmes brûlantes le tombeau du juste Lazare et fit construit au-dessus une église en son nom (8) . Elle ganga le Jourdain, où le Christ fut baptisé (9) , elle le traversa et trouva la caverne où le précurseur avait habité. Elle y bâtit une église au nom de Jean le Baptiste. En fait, de la caverne est un lieu très élevé — ἀπό δέ τό σπήλαιον ἀντίκρυς ἔστι τόπος ὑψηλότερος - au quel saint Elie fut enlevé au ciel ; elle ordonna d'y bâtir un temple très majestueux au nom du prophète Elie et alla à la ville de Tibériade distante de la sainte cité de quatre jours de route. A l'entour de Tibériade on trouve l'endroit — τό λεγόμενον δωδεκάθρονον - où le Christ s'asseyait et enseignait, où il multiplia les sept pains et nourrit les quatre mille, et au même endroit est Capernaoum — Καπερναούμ — où le Chr ist demeura où se trouve aussi la maison de saint Jean le Théologien où (Jésus) mangea avec ses disciples- ὅπου ὁ θεῖος καί δεσποτικός δεῖπνος γέγονε - ; là aussi eut lieu le miracle du centurion et ils descendirent le paralytique par le toit. Sainte Hélène ordonna de construire des églises en ces endroits. Elle traversa le fleuve qui était près de lui près de là, et trouvant une pierre en forme de croix- πέτραν ἔχουσαν τύπον σταυροῦ - su r laquelle le Christ guérit l'hémorroïsse, elle éleva une église au nom de la croix vénérable et vivifiante ; partant de là et arrivant à un certain castel — καστελλίον τι —près de la croix dont nous venons de parler, où il y a un grand jet d'eau appelé Sept-Sources — βρύσις μεγάλη , τό λεγόμενον ἑπτάπηγον — où le Christ fit le prodige et le prodige des cinq pains et des deux poissons, elle y construisit un tempe très remarquable. Elle alla de là à la mer de Tibériade et, trouvant l'endroit où Notre-Seigneur, après la résurrection, apparut aux apôtres pendant qu'ils prêchaient ou se trouvaient les charbons et le poisson dessus avec du pain, où il mangea avec eux et où ils prirent les cent cinquante-trois poissons, elle y construisit une église au nom des bienheureux apôtres. Elle marcha encore deux milles et, trouvant la maison de Marie de Magdala - τῆς Μαγδαλινῆς Μαρίας — et l'endroit où le Christ la délivra des sept démons, elle y éleva le temple de Marie de Magdala .... Elle entra dans la ville de Tibériade et, trouvant au milieu la maison de la belle-mère de Pierre qui fut guérie de la fièvre, elle y éleva une très belle église (a) saint Pierre, coryphée des apôtres. Elle sortit de Tibériade, marcha dix milles vers le couchant et alla au mont Thabor (10) où Melchisédech bénit Abraham, puis cherchant le lieu où leChrist notre Dieu fut transfiguré, elle y bâtit une église au nom de Dieu notre Sauveur et de ses saints apôtres Jacques et Jean. Elle consacra à ce très auguste (ouvrage) des hommes pieux pour travailler avec art et chanter — εἰς τό καλλιεργεῖν καί ψαλλεῖν - ainsi que beaucoup de ses revenus (11) .

Elle alla ensuite de la montagne vers le levant et arriva à Nazareth . Cherchant la maison où la mère de Dieu fut salué par l'archange Gabriel, elle y construisit le temple extraordinaire — ναόν παράδοξον (12) — de la très sainte mère de Dieu. De la ville de Nazareth, elle gagna le pays - παράδοξον -

de Cana de Galilée et, cherchant l'endroit o ù eut lieu la noce de Simon le Cananite , o ù le Christ changea l'eau en vin, elle y le très auguste (13) .

Allant au Bethléem qui est à six milles de la sainte site après y avoir construit une grande église élégante - ἐκκλησίαν μεγάλην δρομικήν - en forme de croix au nom du Christ notre Dieu, et après avoir enfermé en dedans sous le grand autel et la crèche et la sainte caverne , elle sortit de Bethléem (14). Cherchant le lieu dans lequel les saints Innocents – τά ἅγια βρέφη - tirés sous Hérode avaient été massacrés et vénérant cette caverne comme il était juste, après avoir bâti une église au nom des saints enfants, elle alla au saint champ des bergers – τό ἅγιον ποιμενεῖον - et, trou vant l'endroit dans lequel les saints anges annoncèrent aux bergers la naissance de Notre-Seigneur Jésus Christ et dirent: Gloria in excelsis Deo et in terra pax, y ayant élevé un temple très remarquable en l'honneur de Marie, mère de Dieu, et de Joseph, le père nourricier – τοῦ μνήστορος - elle courut à la sainte Sion.

La sainte Sion est sur le lieu surélevé de la sainte cité vers le midi; sainte Hélène y construisit une église élégante, grande en longueur et en largeur— ἐκκλησίαν δρομικήν μεγάλην εἰς τό μῆκος καί πλάτος - au lieu, de tuiles elle 1a couvrit de plomb et elle enferma à l'intérieur vers les parties de derrière du temple — περιέκλεισεν ένδοθεν προς τα όπισθεν μέρη του ναού — à droite l'habit ation des saints disciples où ils étaient cachés de crainte des Juifs et le Christ parut au milieu d'eux les portes étant fermées ; à gauche, la colonne de porphyre sur laquelle le Christ notre Dieu fut attaché et flagellé par les Juifs. Dans ce (temple) à droite de l'autel est le saint Niptêr (15) et la descente du Saint Esprit en la sainte Pentecôte... Elle fit aussi de la cour de Calph e le temple du saint digne des plus grands éloges, du coryphée des apôtres, Pierre (16 ). La distance de la sainte résurrection (Saint-Sépulcre) jusqu'à sainte Sion est d'un mille.

La sainte et première reine des chrétiens Hélène bâtit beaucoup d'autres églises de Dieu dans ces saints : sur le lac (la citerne) du prophète Jérémie, sur la source de Siloé (17), sur le champ du potier pour la sépulture des pauvres; au chêne du Membré o le Sauver apparut à Abraham (18) et au saint Lithostroon (elle bâtit une église à l'honneur) des saints Cyr et Jean.

Sainte Hélène ayant commandé brièvement de fon­der vingt-huit églises dans ces saints lieux prit avec elle la portion de la sainte Croix qu'elle s'était gardée et les saints clous [du corps du Christ ] (18) et retourna à Byzance près de son fils Constantin. Celui-ci l'accueil­lit avec joie; il plaça la portion du bois vivifiant [de la Croix] dans un reliquaire d'or et le donna à garder au très saint évêque Alexandre, car le bienheureux Métrophane était mort. Quant aux clous, il en mit à son casque et il en mélangea au [fer du ] frein de son cheval, afin que la parole du prophète fut accomplie: « En ce jour-là ce qui est sur le frein du cheval du roi sera saint au Seigneur Tout-Puissant ». Zach ., xiv, 20.

Le roi très honorable et très saint, Constantin lui- même, écrivit à Macaire, chef de l'Église de Jérusalem, de veiller à la construction des églises du Christ et il envoya des chefs pour ce travail avec abondance de richesse pour faire construire les saints lieux de manière à ce qu'il n'y eût rien d'aussi beau sur toute la terre ; il écrivit encore aux chefs de la province de concourir avec zèle aux travaux à l'aide des deniers publics.

Ce récit est assurément curieux et ne dépare pas parmi les Itinera hierosolymitana . Bien que personne n'ait visité la Terre sainte avec des intentions aussi dispendieuses, l'impératrice fit, à sa manière, un pèle rinage et il est intéressant de le comparer avec celui de deux autres grandes dames du IVe siècle, sainte Paule et Ethéria . On ne relève entre le texte de l'Anonyme et celui d'Eusèbe dans sa Vie de Constantin, I , III, c. xxv-liii, aucune contradiction formelle et il semble même possible d'insérer l'Anonyme dans le texte d'Eu­sèbe comme un complément. Mais lorsqu'on voit la vieille impératrice parcourir la Palestine en ne prenant que le loisir de désigner l'emplacement des édifices à construire, on est pris de quelques doutes sur la possi­bilité de ce qu'on oserait appeler, sans jeu de mots, une course aux clochers. Cette entreprise de vingt-huit basiliques constantiniennes commandées en l'espace de quelques mois, deux années au plus, est un spectacle tout à fait original, surtout quand on pense que les principales ressources de l'empire comme argent, architectes, maçons, carriers étaient alors mobilisées pour la construction de Constantinople. Et ces basi­liques sitôt décidées, l'impératrice semble en avoir marqué l'emplacement, déterminé le vocable, accepté ou discuté le plan. Ce n'était pas de la construction destinée à s'effondrer ou à être remplacée, puisque le sanctuaire de Bethléem subsiste, celui de Nazareth a été retrouvé (19) et le Saint-Sépulcre est encore représenté par des vestiges. Cependant Hélène n'a pu rien voir, rien surveiller, elle suivait son itinéraire et la mort la guettait au retour. Ce fut Constantin qui assuma cette extraordinaire entreprise qui devait plaire au bâtis­seur effréné qu'il était. L'Anonyme nous apprend qu'il envoya des chefs et abondance de richesse et stimula l'administration impériale (20). On ne peut que souhaiter voir un jour une étude des monuments, des moindres vestiges et des textes relatifs à cet extraordinaire épi­sode archéologique.

D'après une tradition populaire recueillie par l'his­torien arabe Masoûdi , le nom de sainte Hélène se trouverait gravé avec la croix dans toutes les églises d'Orient construites ou censément construites par elle. Il faudrait retrouver ce nom dans le rho combiné avec la croix dans le monogramme constantinien. En effet la valeur numérale des cinq lettres composant le nom grec Hélène est de cent, comme celle de la lettre rho.


NOTES

(1) Voir la note 1 de la col. 2129. Il existe un manuscrit Vatic . 974 (XIe siècle) des mss. du XIIe siècle à Londres Bnt . Mus ., addit . 19458, Paris, Bibl. nat . 1453, 1534 à Jérusalem, au Mont Athos, à Messine, à Munich, à Oxford etc.

(2) Nicéphore Calliste, Hist. I, VIII, c. xxx.

(3) F. Nau , Les constructions palestiniennes dues à sainte Hélène, d'après une rédaction du Xe siècle , source de Nicéphore Calliste, viii, 29, 30, 32, dans Revue de l'Orient chrétien, 1905, t. x, p. 164-168.

(4) C.-J.-M. de Vongué , Les églises de la Terre sainte, in 4», Paris, 1860, 149. Ceyer , Itinera hierosolymitana , Vindobonae , 1898 , p.234.

(5) Cette église est mentionnée dès le V e siècle. Vogué place sa construction au IVe siècle, p-305-306.

(6) Ibid. p. 313.

(7) Ibid. p. 56, 319, mentionne au IVe siècle par Eusèbe et les pèlerins de Bordeaux.

(8) Ibid.p . 336.Saint Jérôme connaît cette église.

(9)Geyer, Itinera , p. 265-286.

(10) Ms. Paris, gr. 1453, le ms. Addit , 19458, porte :προς το βόρειον όρος.

(11) Ces deux églises étaient sans doute 7 sur Il y reste les ruines d'une église que Vogüé considère comme un des plus anciens monuments de la Terre sainte, Églises , p. 353; Geyer, Itinera , p. 275.

(12) Vogüé , Églises, p. 348-351.

(13) Ibid., p. 355.

(14) Ibid. 50-51, cf. 47, 61, 63, 64. D'après notre auteur, Sainte Hélène semble avoir contourné le lac de Tibéria par l'Est et le nord. A partir de Tibériade, les indications ne concordent plus avec la carte. L'auteur ne plaçait pas la rencontre d'Abraham et de Melchisédech au Thabor ou ne connaissait pas la position de cette montagne. On écrirait maintenant: elle sortit de Tibériade et marcha dix milles vers les sud-ouest jusqu'au Thabor, puis vers l'ouest jusqu'à Nazareth.

(15) C'est le bassin qui servit au lavement des pieds. Joan. XIII, 5.

(16) Geyer, Itinera , p. 155.

(17) Cf. J. M. De Vogüé , op. cit ., p. 321.

(18) Ibid., p. 58, note 1, p. 347.

(19) Ces quatre mots manquent dans le ms. Par. 1453

(20) S. Valhé , Origines de la fête de l'Annonciation, dans Echos d'Orient, 1906, t. IX , p. 144-145, n'admet pas que le sanctuaire de Nazareth ait été élevé par Hélène; il donne la préférence au comte Joseph.

(21) Dès 327. on commence les constructions du saint Sépulcre, du Mont des Oliviers et de Bethléem. En 333, le pèlerin de Bordeaux constate que plusieurs des nouvelles basiliques sont terminées. Voir Dictionn ., au mot Itinéraires .

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