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Institution synodale et Administration ecclésiastique durant l'époque conciliaire jusqu'au patriarcat de Photius 1

Prof. Archim. Grigorios D. Papathomas

La préparation du Saint et Grand Concile de l'Église orthodoxe à venir est une initiative des plus importantes, dans la mesure où elle permet, non seulement d'encourager les relations inter-orthodoxes, fortement éprouvées à l'époque moderne (1870-2011), mais aussi d'apporter un témoignage crédible de l'Église orthodoxe quant aux problèmes pressants de l'homme et du monde d'aujourd'hui.

Ces deux perspectives se manifestent autant dans le choix des questions qui seront à l'ordre du jour du Concile panorthodoxe à venir, que dans la contribution constructive des Églises autocéphales orthodoxes établies localement à la préparation des thèmes, qu'elles ont élaborés sous l'égide du Patriarcat œcuménique de Constantinople, au cours des six réunions de la Commission inter-orthodoxe préparatoire (1971, 1986, 1990, 1993, 2009, 2011) et des quatre Conférences panorthodoxes préconciliaires (1976, 1982, 1986, 2009).

Ce processus conciliaire est la continuation authentique de la tradition conciliaire multiséculaire de l'Église orthodoxe, qui a su préserver une relation harmonieuse du système synodal/conciliaire avec son administration ecclésiastique aux niveaux local, régional et œcuménique/universel, d'une part, et avec l'expérience mystérique du corps ecclésial, d'autre part. En ce sens, le Synode/Concile est, comme l'a affirmé saint Jean Chrysostome, une autre appellation de l'Église, lorsqu'il dit que « l' Église est un nom du Synode» 2, [l'Église qui porte le nom de synode, qui tire son (sur)nom du synode ; Église est donc un nom conciliaire ] », étant donné qu'il fonctionne comme elle : l' administration ecclésiastique exerce une fonction synodale/conciliaire en un lieu donné, l' institution conciliaire est chargée de l'administration ecclésiastique en une région donnée, tandis que, dans une perspective œcuménique/universelle, l'autorité conciliaire dépasse les critères territoriaux de l'administration ecclésiastique pour témoigner de l'union de l'Église dans la communion de la foi transmise et dans l'union de l'amour.

Un lieu où s'exprime clairement la fonction conciliaire de l'Église est la synaxe eucharistique, où l'évêque est le garant de l'eucharistie en tant que représentant de la continuité, de la foi et de l'ordre apostoliques dans la vie de toutes les Églises établies localement « répandues à travers tout l'univers » 3 ; c'est la raison pour laquelle l'évêque constitue, par sa consécration canonique mystérique , la tête visible du corps ecclésiastique local, « en lieu » et « en place » du Christ. Par conséquent, l'évêque est l' autorité instituant et statutaire , en ce qui concerne non seulement toute évolution historique de l'administration ecclésiastique, mais aussi l'organisation du système synodal/conciliaire de l'Église, correspondant à cette administration.

La relation donc entre administration ecclésiastique et système synodal/conciliaire s'est maintenue tout au long des trois premiers siècles, lorsqu'il s'agissait de la formation du corps ecclésial dans chaque synaxe eucharistique dirigée par l'évêque, ainsi que de la convocation des évêques voisins en vue de pourvoir le siège épiscopal vacant d'une Église locale ou de régler en commun des questions de foi et de taxis canonique. Cette tradition ecclésiale coutumière des trois premiers siècles a acquis un caractère institutionnel lors du Ier Concile œcuménique de Nicée (325), qui a introduit le système métropolitain dans chaque province de l'Empire romain et confié l'administration ecclésiastique au Synode provincial/régional de tous les évêques de la province 4. Ce Synode périodique réunissait deux fois par an 5 tous les évêques de la province, sous la présidence de l'évêque de la métropole de la province, à savoir l'évêque métropolitain, afin de régler des questions concernant, d'une part, la chirotonie et le jugement des évêques et, d'autre part, la foi et la vie des Églises locales de la province 6.

En ce sens, il est possible de dire que ce Synode provincial-régional a été officiellement reconnu comme autorité ecclésiastique supérieure. Aussi, ses décisions n'étaient-elles soumises à aucune autre autorité synodale ecclésiastique transfrontière ( hyperoria ), étant donné que, dans l'exercice de l'administration ecclésiastique, le Synode provincial, où le métropolite jouait le rôle de coordinateur, agissait en qualité de pouvoir autonome [ autodyname ], «  dont la chirotonie des évêques est la mission principale et la plus importante» 7. Par conséquent, le fait que le Synode provincial soit responsable de l'élection, de la chirotonie et du jugement, non seulement de tous les évêques des Églises locales, mais aussi du métropolite, a donné à la communion des Églises locales de la province sa première forme d'Église établie localement autocéphale . C'est pourquoi, il était inscrit dans la conscience ecclésiale commune, selon l'éminent canoniste Théodore Balsamon, qu' «  autrefois, tous les métropolites des provinces étaient autocéphales et ordonnés par leurs propres Synodes» 8.

Il est donc évident que le métropolite détenait cette autorité particulière, qu'on lui accorde généralement, de convoquer le Synode provincial et de veiller à son bon déroulement, puisque l'évêque de la capitale provinciale, de la “métropole”, avait les privilèges de protos dans ses relations avec les évêques de la province, qui devaient le reconnaître comme «  tête» et n'étaient pas autorisés à agir sans son avis. Dans cet esprit, le 34 e canon apostolique était tenu comme autorité canonique absolue et irremuable qui réglait, non seulement la relation du métropolite avec le Corps des évêques de la province dans le cadre du Synode provincial, mais aussi la relation de n'importe quelle « tête » administrative d'un organe synodal avec d'autres « têtes » homonymes, à n'importe quel niveau de l'administration ecclésiastique. En conformité donc avec le 34 e canon apostolique, «  les évêques de chaque nation (=province) doivent reconnaître lequel d'entre eux est leur protos, et qu'ils le considèrent comme leur tête ; et qu'ils ne fassent rien de plus sans son avis ; et que chacun ne s'occupe que de ce qui concerne son épiscopie et les campagnes situées au sein de son épiscopie. Mais, lui aussi, qu'il ne fasse rien non plus sans l'avis de tous. Car la concorde régnera ainsi et Dieu sera glorifié par le Christ dans l'Esprit Saint, le Père, le Fils et le Saint Esprit» 9. Dans le même esprit, le canon 9 du Concile local d'Antioche (341) stipule que «  les évêques de chaque province doivent savoir que l'évêque qui préside à la métropole, est chargé du soin de toute la province, car c'est à la métropole que se rendent de toutes parts ceux qui ont des affaires à traiter»10 .

Néanmoins, le fond ecclésiologique du rôle déterminant du protos dans tout système d'administration ecclésiastique et dans les organes conciliaires correspondants est exprimé à la perfection par l'éminent canoniste Jean Zonaras dans son commentaire de cet important canon. En effet, il souligne que, «  lorsque la tête n'assure pas leurs actions, les corps se meuvent de manière défectueuse, s'ils ne deviennent pas complètement inutiles ; de la même manière, le corps de l'Église, si son protos, celui qui assume la fonction de tête, ne bénéficie pas de l'honneur qui lui est dû, se meut de manière désordonnée et défectueuse . C'est pour cette raison que le présent canon ordonne que tous les évêques de chaque province, c'est-à-dire les évêques de chaque métropole, reconnaissent qui est le premier d'entre eux et le considèrent comme leur chef [tête], et ne fassent rien d'inutile sans le consulter, rien qui concerne la situation de l'Église, comme par exemple des questions concernant les dogmes, les corrections d'erreurs communes, la chirotonie des évêques et autres choses similaires, mais qu'ils se réunissent autour de lui à ces sujets et que tous ensemble décident le meilleur qui sera bon pour tout le monde» 11.

L'évêque métropolitain donc, en tant que tête administrative du Corps épiscopal de sa province, avait l'honneur exceptionnel et le privilège exclusif de convoquer le Synode provincial, de le présider, d'y introduire les questions à l'ordre du jour et de veiller à l'application fidèle des décisions de ce Synode. Ainsi, sans la décision, la présence ou le consentement du métropolite de la province, la convocation d'une réunion du Synode provincial était anticanonique et, par conséquent, les décisions du Synode étaient invalides, ainsi que le stipule le 4 e canon du Ier Concile œcuménique : «  L a confirmation de ce qui s'est fait revient de droit, dans chaque province, à l'évêque métropolitain» 12. De plus, le 6 e canon du même Concile ajoute que «  si quelqu'un a été ordonné évêque sans l'approbation du métropolite, le Synode décide alors que la personne ordonnée n'est pas évêque» 13.

Sans la décision canonique ou la participation du métropolite de la province, la convocation et la réunion du Synode provincial invalidaient tant le Synode lui-même que ses décisions. Ainsi, le 19 e canon du Concile locale d'Antioche stipule que «  aucun évêque ne peut être ordonné sans le Synode et la présence de l'évêque métropolitain de la province ; il serait aussi souhaitable que soient présents les autres évêques de la province que le métropolite devra convoquer par lettre…» 14. Dans la même perspective, le 20 e canon du même Concile interdit strictement aux évêques de chaque province «  de se réunir en synode entre eux sans la présence des métropolites» 15. Par conséquent, le protos est un élément constitutif indispensable du Synode provincial, comme l'est, par extension, le protos dans tout organe synodal/conciliaire canonique, à n'importe quel niveau d'organisation de l'administration ecclésiastique, étant donné que la bouche des évêques n'a d'autorité canonique et liturgique complète que lorsqu'elle est unie à sa tête administrative. C'est pourquoi le 16 e canon du Concile local d'Antioche considérait qu'un «  synode (provincial) complet est celui auquel participe l'évêque de la métropole» 16.

Il va donc de soi et sans dire que, s'il est canoniquement indispensable que tous les évêques de la province, sans lesquels il ne saurait être de synode «  complet», soient attachés au Synode provincial, il est tout autant indispensable que la présidence du Synode soit assumée par le métropolite de la province, sans lequel nulle réunion conciliaire arbitraire des évêques de la province ne saurait être « complète ». Cependant, tout ce qui est jugé indispensable dans la tradition canonique de l'Église sous-tend un fond ecclésiologique. En l'occurrence, le protos ainsi que ceux détenant le droit canonique d' évêques sont indispensables (principe canonique de réciprocité constitutive [( κανονικὴ ἀρχὴ τῆς συστατικῆς ἀμοιβαιότητ o ς )]) pour que soit établie une relation harmonieuse entre système synodale conciliaire et administration ecclésiastique.

Bien entendu, même si, dès lors, la circonscription territoriale métropolitaine de la province fonctionnait comme un corps ecclésiastique administrativement autocéphale, dont la « tête » était le métropolite et l'autorité suprême le Synode provincial, elle n'en était pas pour autant coupée de la communion avec les autres métropoles de l'« Église répandue à travers tout l'Univers » 17. Car, d'une part, la communion de la foi devait être affirmée en permanence et, d'autre part, les métropoles devaient nécessairement collaborer pour lutter contre les tendances hérétiques ou schismatiques. Par ailleurs, le fait qu'il n'ait pas été prévu d'organe conciliaire supérieur pour contrôler les décisions ou les actes éventuellement anti-canoniques des Synodes/Conciles provinciaux s'est particulièrement fait sentir après le Ier Concile œcuménique de Nicée (325) , quand des évêques orthodoxes ont été déposés à la suite de décisions arbitraires des Conciles arianisants.

C'est pourquoi, il a été discuté de l'opportunité d'un « Grand Concile », auquel participeraient les évêques des provinces limitrophes. Ce Concile aurait droit d'appel sur les décisions du Synode provincial et pourrait juger en recours des cas dépassant ses limites juridictionnelles et territoriales 18. Cependant, le système synodal conciliaire n'est pas parvenu à résoudre le problème de la transgression des limites canoniques de l'administration ecclésiastique, si bien qu'on a dû recourir au choix contraire , à savoir au développement de l'administration ecclésiastique dans les frontières territoriales plus larges de l'Administration romaine civile (diœcesis). Celle-ci regroupait plusieurs provinces dans une même circonscription administrative et convenait à la convocation d'un Grand Synode/Concile de l'Administration , où étaient représentées toutes les provinces de la circonscription, sous la présidence du métropolite de la capitale administrative, à savoir le premier métropolite selon la taxis , l'«  exarque de l'administration».

Par conséquent, le IIe Concile œcuménique de Constantinople (381) a officiellement introduit le système exarchal dans l'administration ecclésiastique et le Grand Synode/Concile de l'Administration dans la tradition conciliaire de l'Église (2 e et 6 e canons). Toutefois, l'imprécision de ces canons, autant que les violentes réactions des métropolites tout-puissants, n'ont pas permis son application. Ainsi, la voie était ouverte à l'introduction du système patriarcal dans l'administration ecclésiastique par les décisions du IVe Concile œcuménique de Chalcédoine de 451 et du Synode patriarcal dans la tradition conciliaire de l'Église (9 e, 17 e, 28 e et 30 e canons), sous l'autorité extraordinaire des sièges officiellement investis d'une « primauté d'honneur », à savoir les sièges patriarcaux de Rome, de Constantinople, d'Alexandrie, d'Antioche et de Jérusalem.

L'instauration du Système patriarcal a mis un point final au développement de l'organisation administrative de l'Église en introduisant les primautés d'honneur, officialisées canoniquement, ainsi que la juridiction administrative supra-métropolitaine avec le système canonique de la Pentarchie des patriarches , laquelle non seulement a favorisé le bon fonctionnement de la relation du Synode patriarcal de chaque siège patriarcal avec les Synodes provinciaux des métropoles placées sous sa juridiction canonique, mais aussi a ouvert de nouvelles perspectives quant à la convocation et la réunion canoniques du Concile œcuménique. Ainsi, après le IVe Concile œcuménique (451), tous les Conciles œcuméniques ont été convoqués et réunis dans le strict respect du principe canonique de participation, de représentation ( délégation ) ou de consentement des cinq sièges patriarcaux, tout en préservant intégralement les droits canoniques du concile provincial, en référence, cependant, à l'autorité suprême du Synode patriarcal du siège patriarcal concerné.

Ces critères canoniques ont été proclamés par la suite avec les canons importants 13, 14 et 15 du Concile local Prime-Second de Constantinople (861) et appliqués lors des deux Conciles Majeurs de Constantinople , sous le patriarcat de saint Photius le Grand 19, des années 869-870 , avec les canons 17 et 21, et des années 879-880 , avec le canon 1, respectivement. Ces deux Conciles restent dans la mémoire des Églises d'Orient et d'Occident comme des expressions caractéristiques de la relation entre système synodal et administration ecclésiastique , dans la Tradition canonique commune du premier millénaire de l'existence historique de l'Église. En ce sens, nous estimons nécessaire, afin de faciliter le rétablissement de la communion ecclésiale entre les Églises d'Orient et d'Occident, d'insérer ces canons dont l'importance tient au fait que, d'une part, ils récapitulent de façon authentique et constructive les principes fondamentaux de la tradition canonique en question et, d'autre part, ils ont été énoncés lors des derniers Conciles majeurs du premier millénaire de l'existence historique de l'Église. C'est la raison pour laquelle ils présentent un modèle incontournable de dialogue constructif, susceptible de contribuer à la levée du « schisme » du 11 e siècle entre les deux Églises, en respect de la tradition commune du premier millénaire.

 

Conciles majeurs de Constantinople (861, 869-870, 879-880)

1. Concile Majeur Prime-Second de Constantinople (861)

Canon 15 . « Les décisions prises à l'égard des prêtres et des évêques doivent encore plus s'appliquer à l'égard des patriarches. C'est pourquoi, si un prêtre, ou un évêque, ou un métropolite osait se séparer de la communion de son patriarche et ne commémorait pas son nom, comme cela a bien été établi et fixé, au cours de la célébration des Mystères divins, et s'il provoquait un schisme avant qu'un synode d'évêques ne le cite à son tribunal et ne le condamne définitivement, notre saint synode a décidé qu'il doit être totalement privé de toute dignité sacerdotale, dès qu'il sera convaincu d'avoir commis cette iniquité. Ces décisions ont été prises et confirmées contre ceux qui, sous le prétexte de quelque accusation se séparent des supérieurs, provoquent des schismes et déchirent l'unité de l'Église. Quant à ceux qui s'écartent de la communion de leur supérieur hiérarchique, en raison d'une hérésie condamnée par les saints conciles ou par les Pères, à condition qu'il prêche publiquement l'hérésie et l'enseigne tête découverte du haut de l'ambon à l'église, non seulement ils ne seront pas soumis à des sanctions canoniques, mais ils recevront même les honneurs dûs aux défenseurs de l'Orthodoxie. Ce ne sont en effet pas des évêques qu'ils ont condamnés, mais au contraire de faux évêques et de faux docteurs et ce n'est pas eux qui ont déchiré l'unité de l'Église par des schismes : eux n'ont pas fait autre chose que de s'efforcer de préserver l'unité de l'Église, alors qu'elle était menacée par des schismes et des dissensions ».

2. Concile Majeur de Constantinople (869-870) [« papophile »]

Canon 17 . «  Le premier saint concile œcuménique de Nicée ordonne le maintien de l'ancienne coutume à travers l'Égypte et les provinces qui lui sont soumises de sorte que l'évêque d'Alexandrie ait pouvoir sur elles toutes, disant : Parce que dans la cité des Romains aussi une telle coutume l'a emporté 20. Pour cette raison, ce grand et saint concile décrète lui aussi le maintien en toute de l'ancienne coutume, tant dans l'ancienne que dans la nouvelle Rome, qu'aux sièges d'Antioche et de Jérusalem, de telle sorte que les titulaires de ces sièges aient pouvoir sur tous les métropolitains qui sont promus par eux, et qui reçoivent confirmation de leur dignité épiscopale, soit par l'imposition des mains, soit par la remise du pallium. Qu'ils puissent les convoquer, en cas de nécessité, à une assemblée synodale, et même les punir et les corriger, quand par hasard la nouvelle de quelque délit viendrait les accuser.

Mais, puisqu'il y a certains métropolitains qui, pour ne pas se rendre à la convocation de leur chef apostolique, prétendent faussement qu'ils sont retenus par les princes du siècle, il a été décidé qu'une telle excuse n'avait absolument aucune valeur. En effet, alors qu'un archonte réunit fréquemment des assemblées pour ses affaires, il serait impie d'empêcher les métropolites de tenir des synodes pour les affaires de l'Église, ou de défendre à certains de s'y rendre, bien que nous ayons appris que ces simulacres de défense et d'interdiction avaient été suggérés par les métropolitains eux-mêmes des diverses manières.

Or, les métropolites ont coutume de tenir deux synodes par an, et à cause de cela, ils prétendent ne pouvoir absolument pas répondre à la convocation de leur chef le patriarche. Mais ce saint concile œcuménique, sans interdire les synodes tenus par les métropolites, reconnaît que les conciles réunis par le siège patriarcal ont beaucoup plus de raison d'être et d'utilité que ceux des métropolites, et c'est pour cette raison qu'il en exige la convocation. En effet, c'est l'administration d'une seule province qui est dirigée par le métropolite, alors que souvent un diocèse tout entier est administré par un patriarche, qui pourvoit par-là à l'utilité générale : c'est pourquoi, il convient de placer le bénéfice particulier après le bien général, quand les supérieurs ont lancé une convocation dans ce but. Cependant, chez certains métropolites, l'ancienne coutume et la tradition canonique semblent être négligées avec mépris, parce que ces gens ne concourent pas au progrès commun, eux que les lois de l'Église, sous peine de sévères condamnations, toute excuse mise à part obligent à obéir aux convocations de leur patriarche, qu'elles aient été adressées en commun ou individuellement.

Par ailleurs, nous avons rejeté loin de nos oreilles comme une affirmation odieuse ce propos tenu par des ignorants : un synode ne peut être tenu sans la présence d'un archonte. En effet, jamais les saints canons n'ont prescrit la présence des princes séculiers aux synodes, mais seulement celle des évêques. Aussi constatons-nous que les archontes n'ont jamais participé aux conciles, à l'exception des conciles œcuméniques : en effet, il ne faut pas que les archontes séculiers soient témoins de ce qui arrive parfois aux prêtres de Dieu.

Or, tout métropolite qui méprisera son patriarche et n'obéira pas à sa convocation, qu'elle soit individuelle, collective ou générale, sauf en cas de très grave maladie ou d'incursion des païens, et qui, dans les deux mois pleins après avoir eu connaissance de la convocation, ne se hâtera pas de se rendre auprès de son patriarche, ou qui, d'une quelconque manière, tentera de se cacher, ou de ne pas reconnaître le message envoyé par le patriarche, sera mis à l'écart. Et si, pendant une année, il montre le même entêtement et la même désobéissance, il sera de toute façon déposé, écarté de toute fonction sacerdotale, et exclu de la dignité et des honneurs dus aux métropolites. Quant à celui qui n'obéira pas à cette ordonnance, il sera aussi anathème ».

3. Concile Majeur de Constantinople (879-880) [« photien »]

Canon 1 . « Notre concile saint et œcuménique a décidé que les clercs, les laïcs et les évêques, originaires d'Italie mais résidant en Asie, en Europe ou en Libye, qui auront été soumis soit à la destitution, soit à l'excommunication, soit à l'anathème par le très-saint pape Jean, seront considérés par Photios le très-saint patriarche de Constantinople comme soumis au même degré de sanction, c'est-à-dire qu'ils seront ou bien excommuniés, ou bien anathématisés, ou bien destitués. Mais d'autre part le très-saint pape Jean, et la sainte Église de Dieu des Romains qui est avec lui, considéreront les clercs, ou les laïcs, ou ceux du rang des prêtres ou des grands prêtres que Photios, notre très-saint patriarche aura soit suspendus, soit anathématisés, soit excommuniés, en quelque diocèse que ce soit, comme étant soumis à la même sanction canonique. Le présent canon ne prétend absolument pas porter atteinte, ni pour le présent ni pour l'avenir, aux privilèges du très-saint siège de l'Église de Rome et de son chef ».

Bien entendu, après ce schisme tragique (1054), les différends entre les Églises d'Orient et d'Occident se creusèrent, encore aggravés tant par l'oppression politique que les Croisés exerçaient sur ses vassaux orthodoxes que par leur soutien à l'activité missionnaire exacerbée que l'Uniatisme latin déploya dans l'Église d'Orient. Toutefois, l'Uniatisme, d'une part, remettait en cause les critères de fonctionnement du système patriarcal, tels que consacrés par la tradition canonique commune de l'époque des Conciles œcuméniques et, d'autre part, entraînait la confusion des juridictions ecclésiales, dont on connaît bien les conséquences néfastes sur les relations entre Églises. Des questions similaires se posèrent lors de la crise du 9 e siècle, quoique dans des conditions ou perspectives différentes. En effet, elles émergèrent, comme chacun sait, non seulement de confusions entre les juridictions des sièges de Rome et de Constantinople à propos des provinces d'Italie du Sud, d'Illyricum oriental et de Bulgarie, mais aussi, au pic de la crise, à propos de la définition du cadre canonique de leur fonctionnement dans lesquelles s'exerçaient les relations des sièges patriarcaux. Dans ces conditions, il est évident que les canons des deux premiers Conciles majeurs de Constantinople (861, 869-870) examinèrent, avec la sensibilité canonique requise, les critères sur lesquels reposaient les relations entre les cinq sièges patriarcaux, de même que le canon 1 du troisième Concile majeur (879-880) s'attacha, avec la même sensibilité canonique, à la description territoriale des juridictions ecclésiales des sièges de Rome et de Constantinople, respectivement en Occident et en Orient.

D'ailleurs, la convocation, la composition, le fonctionnement et, en général, toute l'œuvre des Conciles majeurs du 9 e siècle, reflétaient les critères consacrés par la tradition conciliaire. Après le schisme du 11 e siècle, ces critères, qui furent appliqués dans l'Église d'Orient avec une conscience et une constance remarquables, dénotent clairement l'importance que les Conciles attachaient à l'unité interne de l'Église orthodoxe. Certes, l'organisation administrative de l'Église d'Orient a évolué jusqu'aux temps modernes, en particulier avec le développement du système canonique de l' Autocéphalie ecclésiale . Toutefois, il va de soi que, malgré la multiplication du nombre d'Églises autocéphales en fonction de critères territoriaux inspirés par le nationalisme («  ethno-étatiques»), cette évolution historique n'a pas affaibli, dans la tradition orthodoxe, l'autorité de l'œuvre exemplaire des Conciles majeurs du 9 e siècle, c'est pourquoi ces critères canoniques sont essentiels pour la convocation et la composition, aussi bien que pour la mission du Grand Concile de l'Église orthodoxe à venir.


1Texte publié dans

2Jean Chrysostome ; P. G. , t. 55, col. 493 ; cf. t. 61, col. 527.

3Canons 57/Carthage et 56/Quinisexte.

4Pour le développement et l'évolution des institutions synodales/conciliaires et des systèmes canoniques d'administration ecclésiastique en examen ici, voir Vl. J. Phidas, Histoire ecclésiastique , vol. I, Athènes, 2 1994, p. 804-883 (en grec).

5Voir les canons 5/Ier et 20/Antioche.

6Canons 4, 5, 6 et 7/Ier.

7G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. II, p. 129.

8G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. II, p. 171.

9G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. II, p. 45.

10G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. III, p. 140-141.

11G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. II, p. 45-47.

12G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. II, p. 122.

13G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. II, p. 128.

14G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. III, p. 160.

15G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. III, p. 162.

16G. Rhallis -M. Potlis, Syntagma , t. III, p. 154.

17Canons 57/Carthage et 56/Quinisexte.

18Voir les canons 14 et 15/Antioche, 3, 4 et 5/Sardique, etc.

19Voir, à ce propos, Vl. J. Phidas, Histoire ecclésiastique , vol. II, Athènes, 1994, p. 92-141 (en grec).

20Concile de Nicée I, c. 6.

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